Том 4. Письма 1820-1849 - Федор Тютчев
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La cour, qui est absente en ce moment, rentre à Turin le 1er du mois de septembre. C’est à cette époque que les personnes, arrivées ici dans l’intervalle, sont dans l’habitude de se faire présenter. Il serait difficile, surtout pour des personnes appartenant au corps diplomatique, une fois la cour revenue, de différer beaucoup leur présentation, car plus tard la cour va s’établir à Gênes où elle ne voit pas d’étrangers, et de cette manière l’époque de la présentation se trouverait indéfiniment ajournée. Je n’ignore pas qu’on s’occupe en ce moment chez nous d’un nouveau règlement qui aura pour objet de modifier le costume des dames, appartenant à la diplomatie russe, en leur imposant comme obligatoire à toutes les cours le costume national qui jusqu’à présent n’avait été que facultatif. Or, j’avais pensé à l’arrivée de ma femme qu’il serait peut-être convenable de mettre à profit la latitude, que laissait l’absence du nouveau règlement, pour l’engager à se faire présenter à la cour de Turin avec le costume qui y est en usage. Cette marque de condescendance, qui, venant de notre part, ne saurait, certes, avoir rien d’équivoque, me paraissait devoir être d’un bon effet sous plus d’un rapport. D’abord c’eût été une leçon de modération et de raison qui, pour être courtoise, n’en aurait pas été moins significative. Et plus, en convainquant la cour de Turin de nos dispositions conciliantes sur une question qui comporte si peu l’irritation et l’entêtement, elle aurait eu l’avantage de lui faire apprécier dans son véritable jour le nouveau règlement qui va paraître. Elle lui aurait prouvé que cette mesure du nouveau règlement était une mesure essentiellement générale, se rattachant à un ensemble d’idées parfaitement indépendant des circonstances du moment, ne recélant d’arrière-pensée d’hostilité contre qui que ce soit, et contre laquelle, par cons<é>q<uent>, il n’appartiendrait à personne d’élever la moindre difficulté ni d’articuler la plus petite objection.
Telles avaient été mes idées, et je n’ai pas besoin de vous dire, Monsieur le Comte, combien à l’arrivée de ma femme j’ai été heureux d’apprendre par elle qu’en adoptant ce parti je n’avais fait que pressentir les propres intentions de Votre Excellence et me conformer par avance à ses volontés.
Depuis une conversation, que j’ai eue avec Mad. d’Obrescoff à son retour de Berlin, m’a de nouveau rendu incertain sur ce que j’avais à faire. Mad. d’Obrescoff m’a assuré que, dans l’audience que S<a> M<ajesté> l’Empereur a daigné lui accorder, Sa Majesté avait déclaré que sa volonté était que dès à présent, et même avant la publication du règlement, le costume national fût de rigueur — et même elle a ajouté qu’il lui avait été enjoint de me faire savoir que c’est dans ce costume que la présentation à la cour de Turin devait avoir lieu…
Assurément, Monsieur le Comte, je suis loin de reconnaître aux paroles de Mad. d’Obrescoff un caractère officiel. — Toutefois ses assertions sont si formelles, si positives, et, d’autre part, la seule possibilité que telle fût en effet la volonté de S<a> M<ajesté> l’Empereur est d’un si grand poids à mes yeux que je me vois obligé, bien qu’à regret, de supplier Votre Excellence de m’accorder la faveur d’un mot de réponse, pour fixer mes incertitudes et me prescrire la marche que j’ai définitivement à suivre.
Si Votre Excellence jugeait qu’en effet l’ancien costume ne fût plus de mise, eh bien, je tâcherai de gagner du temps et de différer la présentation jusqu’après la publication du nouveau règlement. Alors il faudra bien que la question se décide d’une manière ou d’autre.
Mais avant tout, Monsieur le Comte, j’attends de la bienveillante équité de Votre Excellence qu’elle me fera la grâce et la justice de croire que rien n’égale la peine et la confusion que j’éprouve d’avoir à l’entretenir de semblables détails. Je subis, en gémissant, une nécessité que je n’ai point créée, mais dont j’ai hérité…
Quant à la partie sérieuse des rapports de notre mission avec la cour de Turin, je n’ai pas besoin de vous assurer, Monsieur le Comte, que je ne cesserai de suivre avec une invariable fidélité les recommandations que Votre Excellence a bien voulu m’adresser l’année dernière, à mon départ de St-Pétersbourg. Je sais le prix que notre cour met à entretenir de bons rapports avec celle de Turin et, je dois le dire, les dispositions que j’ai trouvées ici sont de nature à me faciliter singulièrement l’accomplissement de cette tâche. Car, en dépit de ce puéril différend qu’il eût été si facile d’éviter, les dispositions de cette cour à notre égard sont, il faut le dire, les plus satisfaisantes possibles. Les grandes qualités de l’Empereur sont en profonde et générale vénération ici, comme partout où prévaut un principe d’ordre et de conservation. Les services, rendus par la Russie à la Maison Régnante, sont rappelés en toute occasion avec une franchise de reconnaissance qui ne laisse rien à désirer*. En un mot, sympathie d’opinion aussi bien que l’intelligence de ses intérêts les plus évidents, tout nous rattache cette cour — et si, dans la position donnée, il n’y a aucun mérite à maintenir les rapports sur le meilleur pied possible, il y aurait, par contre, un insigne maladresse ou une fatalité décidée à amener dans ces rapports ne fût-ce que l’apparence de la tiédeur ou de l’indifférence.
Me serait-il permis d’ajouter à l’appui de ce que je viens de dire une particularité qui m’est personnelle? C’est à votre bienveillance éprouvée, Monsieur le Comte, que je livre ma pensée dans toute sa candeur… Depuis mon arrivée à Turin, aussi bien qu’au plus fort de la fameuse querelle, je n’ai cessé un instant de recevoir de la part de toute la société d’ici, et plus particulièrement encore des personnes haut placées à la cour et dans le gouvernement, un accueil tellement gracieux, tellement empressé, si fort en dehors des habitudes de réserve, que l’on attribue au caractère piémontais, que par son exagération même cet accueil a complètement désintéressé ma vanité, en me forçant de n’y voir que ce qu’il y avait en effet, c’est-à-dire l’expression d’une sympathie politique qui, ne sachant où se prendre, s’adressait, faute de mieux, à mon humble individu.
Telle est la position pour le moment, et quoi qu’il pût arriver par la suite, je n’oublierai jamais, Monsieur le Comte, qu’un employé qui a l’honneur de servir sous vos ordres serait plus coupable que tout autre de manquer dans sa conduite de mesure, de convenance ou de modération. Il prouverait par là qu’il est tout à fait indigne d’apprécier et de suivre le modèle qu’il a devant les yeux.
Il ne me reste qu’un vœu à former: c’est que Votre Excellence daigne me continuer ses bontés, ne fût-ce que pour me mettre à même de mériter celles dont elle m’a honoré jusqu’à ce jour.
N’ayant dans cette saison morte et en l’absence de la cour rien de bien intéressant à mander d’ici, je me conformerai aux directions qui nous ont été transmises, en adressant mes rapports officiels directement à St-Pétersbourg.
Je suis avec respect, Monsieur le Comte, de Votre Excellence le très humble et très obéissant serviteur
T. Tutchef
ПереводТурин. 6 августа 1838
Милостивый государь, граф Карл Васильевич,
Смею льстить себя надеждой, что ваше сиятельство соблаговолит простить мне мою навязчивость, принимая во внимание причину, побуждающую меня написать вам это письмо. Я узнал от своей жены о том, какой душевной заботливостью вы изволили окружить ее в такую минуту, когда она столь нуждалась в утешении, и хотя ваше благосклонное участие было вызвано положением, в котором она оказалась, и относилось лично к ней, я все же настоятельно прошу вас принять нашу общую признательность, в коей моя доля не маленькая. Я искренне разделяю радость, которую она испытывает при мысли, что из всех обращенных к ней выражений сочувствия самые сердечные и самые великодушные исходили от вас, милостивый государь.
Жена сказала мне также, что ваше сиятельство не ограничились одним сочувствием ее несчастью. Вы соизволили, милостивый государь, осведомиться об имущественном ущербе, который причинила ей эта катастрофа, и великодушно предложили ходатайствовать перед государем императором о возмещении этого ущерба…* Щедротами государя она и ее сотоварищи по несчастью были встречены почти тотчас же после спасения от кораблекрушения… Таким образом, нам, собственно, надлежало бы лишь воздать благодарность, не позволяя себе никаких новых пожеланий: несчастие, поразившее многих, не дает исключительных прав единицам… Но его величеству угодно соизмерить свои милости не столько с нашими вероятными правами, сколько с нашими нуждами, и никогда, я должен это признать, его благодеяния не были мне столь необходимы. Ибо в ту самую минуту, когда я вынужден заново устраивать свой дом, я сразу потерял все то, что могло мне эту заботу облегчить. Приведись мне ограничиться собственными средствами, мое положение, признаться, было бы крайне тяжело и затруднительно…*
Если бы только я мог закончить на этом письмо, которое должно было бы заключать в себе лишь выражение моей признательности! Ибо мне, милостивый государь, поистине мучительна необходимость вновь привлекать внимание вашего сиятельства к вопросу, самое неприятное в коем — это то, что он таковым является… Я имею в виду этот злосчастный вопрос о костюме. Я буду в отчаянии, если мне, на беду, придется проявить инициативу в этом деле…*
Двор, ныне отсутствующий, возвращается в Турин 1-го сентября. Именно тогда по обыкновению представляются лица, приехавшие сюда к этому времени. По возвращении двора было бы затруднительно, особливо лицам, принадлежащим к дипломатическому корпусу, надолго откладывать свое представление, ибо потом двор переезжает в Геную, где иностранцы не принимаются, и, таким образом, представление отодвинулось бы на неопределенный срок. Мне известно, что в настоящее время у нас подготовляется новый регламент, долженствующий изменить костюм дам, принадлежащих к русскому дипломатическому корпусу, с тем чтобы сделать обязательным ношение национального костюма, которое доныне было лишь добровольным. Я, однако ж, считал, что по приезде моей жены было бы, вероятно, уместно воспользоваться свободой, предоставляемой отсутствием нового регламента, и предложить ей представиться к туринскому двору в костюме, здесь обычно принятом. Это проявление снисходительности, которое, будучи нашим почином, конечно, не заключало бы в себе ничего двусмысленного, должно было бы, как мне думалось, оказаться благотворным во многих отношениях. Во-первых, оно послужило бы уроком сдержанности и рассудительности, политичность коего не умалила бы его наглядности. Кроме того, этот жест, убеждая туринский двор в нашем примирительном отношении к вопросу, заключающему в себе столь мало оснований для раздражения и упрямства, помог бы вышеназванному двору оценить в истинном его значении новый, ожидаемый принятием регламент. Он показал бы, что новый регламент является не чем иным, как общей мерой, связанной с совокупностью идей, совершенно не зависимых от обстоятельств текущего момента, и не имеющей в подоплеке враждебности к кому бы то ни было, а потому нет оснований чинить ей какие-либо препятствия или высказывать против нее какие бы то ни было возражения.